Interview du CFA Agricole 87 pour la mission réfèrent-handicap
En tant que formatrice, cela fait plusieurs années que Charlène travaille au plus près des publics en difficultés scolaires. Sa sensibilité à l’illettrisme et au handicap a doucement fait glisser sa mission au sein du CDFAA : en parallèle de l’enseignement, elle a d’abord été référente illettrisme et proposait du soutien scolaire aux apprentis en difficulté, puis elle est devenue référente handicap en 2019. En septembre 2019, Gisèle Teixeira a contacté le CDFAA et nous a présenté tout ce qui pouvait être mis en place pour nos publics en situation de handicap et tout ce qui pouvait être valorisé.
Depuis janvier 2021, un poste à temps plein a été créé pour la mission référent-handicap. Comment ce choix a été motivé ? Quelle plus-value y voyez-vous depuis 2 mois ?
Le fait d’être à temps plein sur cette mission permet à Charlène d’être bien plus réactive. Par exemple, elle peut très vite se rendre en entreprise lorsque la relation se complique entre un employeur et son apprenti. Elle peut davantage accompagner le jeune dans toutes ses démarches tant administratives, sociales que scolaires et elle peut aussi rappeler rapidement des parents inquiets. Cette disponibilité semble essentielle pour accompagner au mieux un apprenti en situation de handicap. De plus, force est de constater, depuis quelques années, que le nombre d’apprentis en situation de handicap – reconnu ou non – est exponentiel et qu’il faut du temps pour sécuriser tous ces parcours.
Pouvez-vous nous décrire succinctement les missions de la référente handicap au sein de votre centre de formation ?
Tout d’abord, Charlène peut être amenée à accompagner les jeunes et leur famille pour leur reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. Cette année 7 apprentis, entrant en formation, ont bénéficié de cet accompagnement.
Une fois la demande de RQTH en cours (ou acquise), Charlène propose des adaptations du parcours de formation du jeune : durée de la formation, planification des enseignements lors des périodes au CFA, modalités d’individualisation en centre de ressources…
A travers une demande de financement auprès de l’agefiph ou du fiphfp, elle prévoit, anticipe les besoins qu’auront les jeunes en situation de handicap au CDFAA et justifie en fin d’année sa demande de financement.
Charlène coordonne également les plannings et missions de ses collègues dites « aides humaines ». En effet, nous disposons, d’une part, d’un centre de ressources dont les animatrices accompagnent et soutiennent les aménagements de formation de nos jeunes en situation de handicap ou non et d’autre part, d’une animatrice pédagogique qui est en mesure d’intervenir en tant qu’aide humaine lors des séances de cours.
De plus, Charlène accompagne les collègues formateurs dans l’adaptation de leurs supports de cours et dans la compréhension des différents types de handicap rencontrés au CDFAA.
Charlène réalise également des entretiens individualisés très réguliers avec les jeunes accompagnés pour s’assurer que les aménagements conviennent.
Enfin, elle anime un réseau en sollicitant tous les partenaires nécessaires au parcours du jeune : des référents de parcours et des partenaires spécialisés handicap par le biais de la prestation ACCEA par exemple. Elle mobilise également toute personne ou structure susceptible de venir en aide au jeune : éducateurs AEMO, des pédopsychiatres, des neuropsychologues, des équipes mobiles d’Esquirol, des structures type «E-Dip » ou C2RL, des professeurs référents handicap de l’éducation nationale. L’idée est de cadrer le parcours du jeune et de s’entourer de toutes les compétences possibles, cohérentes et volontaires.
En définitive, elle a un rôle d’écoute et de suivi auprès du jeune, de sa famille, de son employeur, des partenaires et fait le lien avec la direction, les formateurs et les animatrices du CFA.
Quel partenariat la référente handicap a-t-elle engagé pour accompagner des parcours de formation de personnes en situation de handicap ?
Les partenaires : GEPH, FEL, mission locale, Cap emploi et la MDPH en Haute-Vienne et en Creuse, l’équipe mobile d’Esquirol (neuropsychologue, pédopsychiatre, ergothérapeute etc.), l’Itep Suzanne Léger, le Sessad pro, des éducateurs AEMO de la Maison du Département et de l’ALSEA, les professeurs référents handicap de l’Education Nationale, les coordonnateurs ULIS et SEGPA dont les apprentis sont issus, l’ESAT Deltaplus87, Plimot87 et bien sûr le CRFH. Tout récemment, de nouveaux partenaires : l’équipe d’intervention précoce « E-Dip » et le C2RL ; Centre Référent de Réhabilitation psychosociale de Limoges ainsi que l’Entreprise Adaptée IDEA à Boisseuil.
De votre point de vue, lorsque Accea a été mobilisée, quelle a été la plus-value pour le CFA, pour les équipes pédagogiques et surtout pour la personne en situation de handicap ? Quel est le rôle de votre référente handicap dans cette construction collective ?
ACCEA permet de réunir autour d’une table tous les acteurs entourant le jeune en situation de handicap. Ce type de réunion – de par son essence même – est très enrichissant. Cela permet de faire un état des lieux très précis des contraintes de l’apprenti et d’en proposer des adaptations en équipe pluridisciplinaire. Les équipes pédagogiques apprécient que les aménagements imaginés avec et pour le jeune soient formalisés, rendus officiels par la démarche collective et experte. Les formateurs sont ainsi moins seuls face à des situations parfois très complexes.
La personne en situation de handicap se sent elle aussi entourée, soutenue et entendue. C’est essentiel pour (re)construire et favoriser l’estime de soi, parce que ces réunions sont aussi l’occasion de rappeler les capacités, qualités et points forts du jeune. De plus, adapter un parcours de formation permet de croire et d’accéder à la réussite, ce qui est bien sûr très valorisant et sécurisant. Il est souvent vrai que les apprentis au cœur du dispositif ont bien souvent été mis de côté par le système scolaire classique et que par conséquent ils se déprécient totalement. Ainsi, ACCEA permet de redonner confiance en soi, de se redresser et de croire enfin qu’il est possible de réussir sa formation voire de poursuivre ses études, ce qui est le cas de plusieurs jeunes en situation de handicap.
Depuis la nomination de votre référente handicap, quels retours avez-vous des différents partenaires (employeurs, partenaires de l’emploi…) en ce qui concerne l’accompagnement des publics en situation de handicap?
Nous avons de très bons retours : les employeurs apprécient d’avoir un interlocuteur direct, disponible et connaissant bien le handicap du jeune et ses contraintes. L’accompagnement de Charlène leur permet aussi de voir et de valoriser les capacités et compétences de leur apprenti malgré le handicap.
Les échanges avec les partenaires de l’emploi sont de très bonne qualité, une confiance s’est très vite instaurée et des passerelles se construisent aisément, régulièrement.
Les parents sont très reconnaissants et soulagés de constater que leur enfant est suivi, accompagné et soutenu dans son choix et parcours de formation. La référente handicap est très disponible pour les familles, ce qu’elles apprécient.
Comment le CRFH vous a-t-il aidé dans la mise en œuvre de vos obligations légales et des missions de votre référente handicap ?
Le CRFH a été d’une grande aide pour former Charlène, notre référente. Nos animatrices qui interviennent avec les jeunes en difficulté vont également bénéficier de formations organisées par le Centre, à l’avenir.
Mme Teixeira a toujours été disponible pour répondre à nos questions et nous accompagner dans nos démarches. Elle a, dans ce cadre, accompagné le CDFAA dans son auto-positionnement. De plus, elle a permis au CFA de connaître et de solliciter les aides financières liées à l’accueil d’un apprenti en situation de handicap, et de valoriser par conséquent des actions déjà menées depuis quelques années et d’en imaginer de nouvelles.
Et si vous deviez résumer en deux lignes l’engagement de votre CFA pour l’inclusion des personnes en situation de handicap ?
Même si nous étions convaincus de la nécessité et de l’intérêt d’améliorer notre accompagnement des jeunes en situation de handicap, la décision de mobiliser les moyens humains et financiers nous permettant de modifier en profondeur nos pratiques n’a pas été évidente à prendre. Dans ce cadre, l’accompagnement apporté par le CRFH a véritablement été prépondérant et les premiers retours sont très encourageants.